Malgré la mise en place de nombreuses mesures gouvernementales afin d’aider les entreprises frappées de plein fouet par la crise du Covid-19, certaines d’entre elles sont contraintes de réduire leurs effectifs afin de sauver leur activité en mettant en place des procédures de licenciement économique.
Les procédures de licenciement sont très encadrées par la loi. Elle doivent en effet répondre à des critères et respecter des procédures précises.
Les salariés portés qui travaillent dans les entreprises de leur client ne sont pas directement touchés par les procédures de licenciement économique mises en place, cependant le licenciement reste une option possible pour le salarié porté à des conditions très différentes.
Le point sur la procédure de licenciement économique et les spécificités du licenciement pour le salarié porté.
Ce qu’il faut savoir :
Pour qu’un licenciement soit licite, il doit répondre au critère principal de la cause réelle et sérieuse. En effet, l’employeur doit justifier d’une cause légitime c’est-à-dire que les faits doivent être exacts, vérifiables et suffisamment graves pour procéder au licenciement.
Il existe différents type de licenciement :
- Le licenciement pour motif personnel : ce licenciement est lié à la personne du salarié (article 1232-1 Code du travail).
- Le licenciement pour motif économique : ce licenciement est lié à un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail (article L1233-3 Code du travail).
- Le licenciement pour faute : ce licenciement est déclenché par la faute du salarié. Il existe plusieurs degrés de gravité de la faute.
La mise en place de la procédure de licenciement économique en raison du Covid-19
- Ce que dit la loi sur les conditions du licenciement pour motif économique
Le licenciement pour motif économique est un licenciement étranger à la personne du salarié. Il est directement lié aux difficultés économiques de l’entreprise.
Ainsi l’article L1233-3 du Code du travail prévoit que : “ Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :
1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente … “
Les difficultés évoquées par les textes sont donc relatives à la baisse importante du chiffre d’affaire et à la dégradation de la trésorerie qui doivent avoir un impact négatif sur la pérennité de l’entreprise. En d’autres termes, les difficultés économiques doivent mettre sérieusement en danger la vie de l’entreprise pour justifier un licenciement économique.
- Le respect de la procédure de licenciement économique
L’employeur qui souhaite licencier un salarié doit respecter une procédure spécifique. Cette procédure est cruciale car en cas de manquement le licenciement peut être considéré comme nul par les juges, c’est-à dire n’ayant jamais existé et ainsi entraîner la réintégration du salarié dans l’entreprise lorsque celui-ci est d’accord (Chambre Sociale de la Cour de Cassation en date du 4 février 2014, n° 11-27134).
Cinq étapes conditionnent la validité de la procédure de licenciement économique d’un salarié à savoir :
- Entretien préalable : l’employeur est tenu d’adresser au salarié une convocation à un entretien préalable au licenciement par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. L’entretien préalable doit avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. (article L1233-11 Code du travail)
- Lettre de licenciement : après un délai de 7 jours ouvrables suivant l’entretien, l’employeur envoie une lettre de licenciement au salarié, par lettre recommandée avec avis de réception (LRAR). Le délai est porté à 15 jours ouvrables pour les salariés cadre.
- Notification du licenciement : l’employeur informe la Direccte (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) du licenciement économique dans un délai de 8 jours après l’envoi de la lettre de licenciement au salarié (article L1233-15 Code du travail).
- Préavis de licenciement : suite à la notification du licenciement, le salarié demeure dans l’entreprise le temps de son préavis. Il peut être dispensé de ce dernier si il a accepté un contrat de sécurisation professionnelle (CSP), un congé de reclassement ou un congé de mobilité.
- Fin du contrat de travail : le contrat prend fin définitivement au terme du préavis.
Le cas particulier du licenciement du salarié porté
Rappelons que le portage salarial désigne l’ensemble organisé constitué par :
“ … la relation entre une entreprise dénommée » entreprise de portage salarial » effectuant une prestation et une entreprise cliente bénéficiant de cette prestation, qui donne lieu à la conclusion d’un contrat commercial de prestation de portage salarial ;
(…) le contrat de travail conclu entre l’entreprise de portage salarial et un salarié désigné comme étant le » salarié porté « , lequel est rémunéré par cette entreprise. “ (article L1254-1 Code du travail).
Un salarié porté est lié par un contrat de travail avec l’entreprise de portage salarial, cette dernière se comportant comme un employeur à l’égard du salarié porté. Dans le même temps, le salarié porté est lié par un contrat commercial à son client pour lequel il rend une prestation en toute indépendance.
Le contrat de travail du salarié porté peut être rompu pour différents motifs dont le licenciement est spécifiquement prévu par l’article 22.3 de la Convention collective de branche des salariés en portage salarial.
Ainsi, si au terme d’une période de 1 mois de prospection, le salarié porté n’a pas conclu de nouvelle prestation et demeure sans activité, il peut être licencié par l’entreprise de portage salarial.
En effet, en cas d’inactivité prolongée, le salarié porté ne remplit plus la condition déterminante du statut de salarié porté à savoir une autonomie lui conférant la capacité de rechercher sa propre clientèle. En l’absence d’autonomie, le salarié porté ne peut donc plus être lié à l’entreprise de portage salarial par un contrat de travail.
Le licenciement du salarié porté est ainsi clairement limité par les textes mettant la plupart du temps le salarié porté à l’abri du licenciement.
Précisons enfin que lorsqu’un licenciement est engagé à l’encontre du salarié porté, c’est la procédure de licenciement prévue à l’article L.1231-1 du Code du travail qui s’applique.
A ce jour, l’épidémie du Covid-19 n’a pas été reconnue comme étant un cas de force majeure en droit social ce qui rend la rupture des contrats de travail très délicate du côté des employeurs. Le licenciement économique doit en toute hypothèse répondre aux critères économiques posés par la loi et être justifié par de réelles conséquences négatives irréversibles pour l’entreprise.
Textes de référence :
- article L1233-3 Code du travail
- article L1232-1 Code du travail
- article L1233-11 Code du travail
- article L1233-15 Code du travail
- ordonnance n° 2015-380 du 2 avril 2015
- Convention collective de branche des salariés en portage salarial du 22 mars 2017 étendue par arrêté du 28 avril 2017 JORF 30 avril 2017
- article L.1231-1 du Code du travail
- Chambre Sociale de la Cour de Cassation en date du 4 février 2014, n° 11-27134