Depuis longtemps, la situation des travailleurs indépendants en France fait débat. Le manque de sécurité financière et matérielle ainsi que les différents obstacles auxquels doivent faire face les travailleurs indépendants lors de la création de leur activité sont autant de sujets qui ne cessent de revenir sur le devant de la scène.
Face à l’augmentation des risques économiques durant la pandémie, la crise sanitaire a inévitablement attisé les insécurités liées à l’entrepreneuriat.
La France compte aujourd’hui près de 2,9 millions de travailleurs indépendants, tous soumis aux aléas connus de l’indépendance : instabilité financière, difficultés à créer une clientèle de départ, difficultés à l’obtention de prêts bancaires lors de la création d’entreprise et une protection sociale souvent fragile.
Depuis 2017, le Gouvernement s’est engagé à soutenir les travailleurs indépendants afin que ces derniers puissent commencer et développer leur activité dans un cadre juridique plus sécurisant.
Des accompagnements ou encore des statuts protecteurs ont été pensés par le Gouvernement afin de faciliter l’entrepreneuriat.
Plus récemment les conséquences de la crise sanitaire ont accéléré les prises de décisions gouvernementales entraînant la création d’un nouveau plan de soutien en faveur des travailleurs indépendants. Le 16 septembre 2021, le Président de la République a présenté 20 nouvelles mesures destinées aux travailleurs indépendants articulés autour de 5 grands axes.
Une partie des mesures sera précisée dans une loi spécifique en faveur des indépendants, une autre partie sera présentée dans la loi de finance 2022.
Quelles sont les mesures de soutien envisagées en faveur des travailleurs indépendants ? Faisons le point sur les principales mesures.
La création d’un statut unique protecteur pour l’entrepreneur individuel
La première mesure vise à unifier le statut d’entrepreneur individuel. Actuellement, l’entrepreneur individuel a le choix entre 2 formes juridiques : l’entreprise individuelle (EI) et l’entreprise individuelle à responsabilité limitée (EIRL).
Rappelons que l’EIRL est la forme de société permettant à l’entrepreneur individuel, en cas de faillite de son entreprise, de protéger son patrimoine personnel.
L’EIRL semble cependant être peu adoptée par les entrepreneurs c’est pourquoi le Gouvernement projette de le supprimer.
L’unification des deux statuts EI et EIRL donnerait lieu à un statut unique protecteur de l’entrepreneur lui permettant de protéger l’ensemble de son patrimoine personnel et non plus uniquement sa résidence principale.
Une protection bienvenue pour de nombreux entrepreneurs individuels.
En outre, la transformation d’une entreprise individuelle en société serait facilitée. Les formalités seraient allégées permettant à l’entrepreneur individuel de passer en société rapidement et sans longue procédure administrative.
Une meilleure protection sociale des indépendants
L’autre mesure phare du plan de soutien des indépendants est l’amélioration de la protection sociale des indépendants.
Sur les cotisations et contributions sociales
Tout d’abord concernant les cotisations sociales des indépendants, les mesures prévoient que les indépendants puissent déclarer au cours de leur activité leur revenu estimé et ainsi payer leurs cotisations et leurs contributions sociales selon l’état réel de leur activité.
Une mesure importante car jusqu’à présent l’assiette de cotisations et les contributions sociales des indépendants dépendait de l’estimation exacte des revenus perçus or, beaucoup d’indépendants ont des revenus variables sur l’année. Cette mesure tend à faciliter les déclarations ainsi que les paiements des cotisations et contributions sociales des indépendants car ces derniers pourront modifier en temps réel leur cotisations.
Actuellement, le fonctionnement des déclarations des revenus est plus rigide puisque lorsque le revenu déclaré est supérieur de plus d’un tiers au revenu estimé par le cotisant, une majoration de retard est appliquée.
Le plan de soutien prévoit de supprimer cette majoration permettant aux indépendants de déterminer en temps réel leur revenu estimé et d’ajuster en conséquence les cotisations en fonction de leurs capacités financières.
Sur les prestations sociales
Ensuite, concernant les prestations sociales, le plan de soutien projette de faciliter l’adhésion au dispositif d’assurance volontaire contre les risques AT/MP.
Rappelons que ce dispositif permet aux travailleurs indépendants de bénéficier de prestations en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle (AT/MP). Grâce à ce dispositif, le travailleur indépendant est indemnisé en cas d’incapacité permanente de même que les ayants droit en cas de décès du travailleur indépendant. En cas de maladie, le dispositif permet la prise en charge des frais de santé du bénéficiaire.
Si les salariés bénéficient automatiquement de ce dispositif du fait de leur statut, les travailleurs indépendants sont nombreux à ne pas être protégés en raison du coût que cela représente. Le plan de soutien prévoit donc une baisse du taux de cotisation d’environ 30% afin d’augmenter l’accessibilité du dispositif aux travailleurs indépendants.
Sur les droits à la retraite
S’agissant des droits à la retraite, le plan prévoit que les indépendants travaillant dans les secteurs suivants : tourisme, événementiel, culture, sport, hôtellerie et restauration, ainsi que des secteurs connexes (listes S1, S1 bis du fonds de solidarité et entreprises fermées administrativement), préservent leur droit à la retraite impactés par la crise sanitaire.
Concrètement, les indépendants concernés bénéficient de la validation d’un nombre de trimestres de retraite en 2020 et 2021 équivalent à la moyenne des trimestres validés lors de leurs trois derniers exercices.
Sur les droits ATI (allocation des travailleurs indépendants)
L’ATI est l’allocation des travailleurs indépendants en cas d’arrêt de leur activité. C’est un dispositif d’allocation chômage destiné aux travailleurs indépendants dont le montant de l’indemnisation est de 800 euros pendant 6 mois.
Actuellement, le bénéfice de ce dispositif est conditionné par plusieurs critères :
- avoir exercé une activité non salarié sans interruption pendant au moins 2 ans ;
- au sein d’une seule et même entreprise ;
- tenant compte des conditions de ressources et de revenus ;
- l’activité indépendante doit figurer dans la liste des professions éligibles (article L. 5424-24 du Code du Travail.)
- faire l’objet d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire prononcée ou engagée depuis le 1er novembre 2019.
Le plan prévoit le bénéfice de l’ATI au profit des indépendants dont l’activité n’est plus économiquement viable et assouplit les conditions de revenu minimum pour bénéficier de l’ATI portant le montant à 10 000 euros sur l’une des deux dernières années d’activité non salariée et non plus sur les deux dernières.
Sur la protection du collaborateur
Le plan revient sur le statut du collaborateur conjoint du chef d’entreprise en prévoyant de limiter l’exercice du statut de conjoint collaborateur à 5 ans dans une carrière.
Après 5 ans, le conjoint collaborateur pourrait choisir entre :
- le statut du conjoint salarié ou
- le statut du conjoint associé.
Par ailleurs, le plan envisage d’ouvrir le statut de conjoint collaborateur, au concubin du chef d’entreprise car actuellement cette option est réservée à la personne mariée au chef d’entreprise ou à celle liée par un Pacs.
D’autres mesures concernant la transmission des entreprises et la simplification de l’environnement juridique des indépendants seront précisées dans la future loi de finances 2022. A suivre…
Sources :