Lorsqu’on est salarié, la question de la retraite semble moins préoccupante, car le système est automatisé : chaque mois, une partie du salaire est prélevée pour financer la pension de retraite future.
Pour les freelances, la situation est plus complexe. Leur retraite repose moins sur la durée de leur activité que sur leur chiffre d’affaires, qui dépend principalement de leur capacité à attirer des clients et à fixer des tarifs justes.
Fixer un prix juste est donc central car il détermine le chiffre d’affaires brut qui doit couvrir les charges fiscales et sociales (retraite, protection sociale).
Dans cet article, nous allons voir comment fonctionne la retraite des freelances en 2025, en tenant compte des dernières évolutions législatives.
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Freelance et statut juridique : quel impact sur la retraite et la protection sociale ?
Le régime de cotisation retraite dépend du statut juridique du freelance.
Un freelance est un travailleur indépendant qui peut exercer son activité sous différentes formes juridiques :
- Entreprise individuelle, notamment en micro-entreprise ;
- Société telle que :
- La Société à Responsabilité Limitée (SARL) ou son équivalent unipersonnel, l’Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée (EURL).
- La Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle (SASU).
Les micro-entrepreneurs, les gérants majoritaires de SARL et les gérants d’EURL sont affiliés au régime de la Sécurité Sociale des Indépendants (SSI) car ils sont considérés comme des Travailleurs Non-Salariés (TNS).
Au contraire, les freelances en SASU ou les gérants minoritaires/associés non gérants de SARL relèvent du régime général de la Sécurité sociale, car ils sont assimilés à des salariés en matière de protection sociale. Dans ce cas, leur couverture sociale est donc plus complète, puisqu’elle est similaire à celle des salariés classiques.
Les deux niveaux de cotisation retraite : régime de base et régime complémentaire
Le système de retraite comprend deux composantes principales :
- Le régime de base obligatoire, qui fonctionne par répartition et garantit une pension minimum en fonction des cotisations versées.
- Le régime de retraite complémentaire, qui permet d’obtenir une pension supplémentaire et qui varie selon l’activité exercée.
- Le régime de base obligatoire
Les freelances cotisent chaque mois ou chaque trimestre en fonction de leur statut juridique :
- Micro-entrepreneurs : leurs cotisations sont calculées sur leur chiffre d’affaires, avec un taux spécifique selon l’activité exercée (vente de biens, prestations de services commerciales ou libérales).
- Entreprises individuelles et sociétés (EURL, SARL, SASU, etc.) : les cotisations sont basées sur le bénéfice réalisé, classé en :
> Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC) : pour les activités de vente de biens et les prestations de services commerciales.
> Bénéfices Non Commerciaux (BNC) : pour les professions libérales et les prestations de services non commerciales.
Le taux et le mode de calcul des cotisations varient selon le régime fiscal et social choisi par le freelance, influençant ainsi sa couverture sociale et ses droits à la retraite.
Une partie de ces cotisations est dédiée à la retraite de base et une autre partie à la retraite complémentaire, avec des taux variant selon la nature de l’activité.
Depuis juillet 2024, les taux globaux de cotisations sociales ont évolué pour les auto-entrepreneurs affiliés au régime général de la Sécurité sociale et déclarant leur chiffre d’affaires dans la catégorie des BNC (Bénéfices Non Commerciaux). Ces taux continueront d’augmenter progressivement jusqu’en 2026 :
- Pour les freelances ayant créé leur activité avant 2018, le taux de cotisation était de 21,2 % avant juillet 2024. Il est passé à 23,2 % dès juillet 2024 et restera stable à ce niveau pour les années suivantes.
- Pour les freelances ayant créé leur activité depuis 2018, le taux de cotisation était de 21,1 % avant juillet 2024. Il a augmenté à 23,1 % en juillet 2024, puis passera à 24,6 % en 2025 et atteindra 26,1 % en 2026.
- Pour les professions libérales réglementées affiliées à la CIPAV, le taux était de 21,2 % avant juillet 2024. Il a été relevé à 23,2 % en juillet 2024 et restera à ce niveau en 2025 et 2026.
Cette augmentation progressive vise à aligner les cotisations des travailleurs indépendants sur un niveau plus équilibré, tout en garantissant une meilleure protection pour leur future retraite.
Pour les activités BIC, aucune augmentation des cotisations sociales n’est prévu en 2025 et restent les suivantes :
- 12,3 % du chiffre d’affaires pour les activités d’achat-revente, y compris la restauration (c’est-à-dire les activités commerciales).
- 22 % du chiffre d’affaires pour les prestations de services (services artisanaux ou autres, sauf les professions libérales).
Ces cotisations permettent de financer la protection sociale du micro-entrepreneur, incluant l’assurance maladie, les allocations familiales, et la retraite (régime de base et complémentaire).
- Le régime complémentaire
Les régimes complémentaires obligatoires pour les freelances viennent compléter le régime de retraite de base. L’objectif de ces régimes complémentaires est d’augmenter le montant de la pension de base, afin d’assurer un revenu plus important lors du départ à la retraite.
Le système de retraite complémentaire des freelances fonctionne sur un principe de points. Ils cotisent sur la base de leurs revenus professionnels, qu’il s’agisse du chiffre d’affaires (micro-entrepreneurs) ou du bénéfice (BIC/BNC pour les autres statuts).
Chaque cotisation permet d’acquérir des points, qui seront ensuite convertis en pension complémentaire lors du départ à la retraite. Plus le montant cotisé est élevé, plus le nombre de points accumulés est important, augmentant ainsi le montant de la pension perçue.
Contrairement aux salariés dont les cotisations sont directement prélevées à la source par l’employeur, les cotisations sociales des freelances sont entièrement à leur charge. Les cotisations sont prélevées sur leur chiffre d’affaires ou leurs revenus professionnels, pour bénéficier de ces régimes complémentaires.
En plus de ces cotisations complémentaires obligatoires, un freelance peut souscrire à des compléments de retraite privés, comme un Plan d’Épargne Retraite (PER), pour optimiser sa pension future.
Comment valide-t-on des trimestres de retraite en micro-entreprise ?
La validation des trimestres de retraite en micro-entreprise dépend du revenu cotisé, qui est calculé sur la base du chiffre d’affaires réalisé et des taux de cotisation applicables. Plus le chiffre d’affaires est élevé, plus les cotisations versées permettent de valider de trimestres dans l’année.
Le processus de validation des trimestres se déroule donc en 3 étapes :
- Calcul du revenu cotisé : il s’agit du montant sur lequel sont prélevées les cotisations sociales. Ce revenu est directement lié au chiffre d’affaires, qui varie selon la nature de l’activité exercée (vente, prestations de services BIC ou BNC).
- Détermination de la part dédiée à la retraite : une fraction des cotisations sociales est spécifiquement affectée à la retraite de base.
- Comparaison avec le SMIC : le revenu cotisé est ensuite comparé au SMIC annuel brut, qui sert de référence pour déterminer le nombre de trimestres validés. En 2025, le Salaire Minimum Interprofessionnel de Croissance (SMIC) en France est fixé à 11,88 € brut de l’heure. Pour une durée légale de travail de 35 heures par semaine, soit 151,67 heures par mois, cela correspond à un SMIC mensuel brut de 1 801,80 € et un SMIC annuel brut de 21 621,60 €.
Quel est le chiffre d’affaires minimum à réaliser pour valider 4 trimestres de retraite en Micro-Entreprise en 2025 ?
En 2025, le chiffre d’affaires minimum à réaliser pour valider 1 à 4 trimestres de retraite en micro-entreprise varie en fonction de l’activité exercée :
- Pour les activités de vente de marchandises (y compris la restauration), il faut réaliser un chiffre d’affaires de 6 145 € pour valider 1 trimestre, 12 290 € pour 2 trimestres, 18 434 € pour 3 trimestres, et 24 579 € pour 4 trimestres.
- Pour les prestations de services relevant des BIC (bénéfices industriels et commerciaux), le chiffre d’affaires nécessaire est de 3 564 € pour 1 trimestre, 7 128 € pour 2 trimestres, 10 692 € pour 3 trimestres, et 14 256 € pour 4 trimestres.
- Pour les prestations de services relevant des BNC (bénéfices non commerciaux) affiliées à la CNAV, il faut atteindre 2 700 € de chiffre d’affaires pour 1 trimestre, 5 400 € pour 2 trimestres, 8 100 € pour 3 trimestres, et 10 800 € pour 4 trimestres.
- Pour les prestations BNC relevant de la CIPAV, pour valider un trimestre de retraite en 2025, il faut percevoir un revenu brut d’au moins 1 782 € ; pour valider deux trimestres, il faut atteindre 3 564 €, pour trois trimestres, 5 346 €, et pour valider l’année complète avec quatre trimestres, un revenu brut de 7 128 € est nécessaire.
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Retraite du Président de SASU : statut, cotisations et validation des trimestres en 2025
Le freelance président de SASU est considéré comme un assimilé salarié, ce qui signifie qu’il bénéficie du régime général de la retraite des salariés (similaire à celui des salariés classiques).
Il est soumis à des cotisations sociales sur son salaire brut, dues à l’URSSAF. Ces cotisations couvrent la retraite de base (gérée par la Sécurité sociale) ainsi que la retraite complémentaire (gérée par l’AGIRC-ARRCO). Toutefois, il n’est pas couvert par l’assurance chômage.
Les cotisations sont prélevées mensuellement sur le bulletin de salaire et sont calculées proportionnellement au montant de la rémunération. Si le président de la SASU ne se verse aucune rémunération, il ne cotise pas et n’acquiert donc pas de droits à la retraite.
Il faut préciser que les dividendes versés ne permettent pas de valider des droits à la retraite.
Pour valider un trimestre de retraite en 2025, le président de SASU doit percevoir un salaire brut annuel minimum de 600 fois le taux horaire du SMIC qui est de 11,88 € (fixé depuis le 1er novembre 2024) soit 7 128 € pour 4 trimestres ou 594 € par mois.
Retraite gérant en EURL : statut du gérant et impact sur la protection sociale et la retraite
L’EURL est une SARL avec un seul associé unique.
La protection sociale et les cotisations retraite dépendent du statut du gérant qui peut être associé unique ou gérant non associé.
- Le gérant associé unique (Travailleurs Non-Salariés – TNS) :
Pour les artisans, commerçants, industriels et les professionnels exerçant une activité libérale non réglementée, l’affiliation se fait à la Sécurité Sociale des Indépendants (SSI).
Pour les professions libérales réglementées, la retraite de base est gérée par la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Professions Libérales (CNAVPL).
La retraite complémentaire dépend de l’activité exercée et est gérée par différents organismes :
- La CIPAV pour certaines professions libérales.
- La Caisse Nationale des Barreaux Français (CNBF) pour les avocats (qui gère à la fois la retraite de base et complémentaire).
- La MSA pour les professions agricoles.
Les cotisations sont dues, avec ou sans rémunération du dirigeant.
Si l’entreprise est soumise à l’impôt sur le revenu (IR), les cotisations sont calculées sur le bénéfice de l’entreprise. Si l’entreprise est soumise à l’impôt sur les sociétés (IS), les cotisations sont calculées sur la rémunération du gérant.
Pour valider 4 trimestres de retraite, il faut percevoir au minimum 600 fois le SMIC horaire brut. En 2025, avec un SMIC horaire de 11,88 €, cela correspond à un revenu annuel de 7 128 €, soit 594 € par mois.
- Le gérant non associé (Assimilé – salarié) :
Le gérant non associé bénéficie du statut d’assimilé-salarié, tout comme le président d’une SASU. Cela signifie qu’il est affilié au régime général de la Sécurité sociale, avec une protection sociale similaire à celle des salariés, à l’exception de l’assurance chômage.
En effet, les cotisations sont prélevées sur sa rémunération et versées à l’URSSAF pour la retraite de base (Sécurité sociale). La retraite complémentaire est gérée par l’AGIRC-ARRCO.
Il ne cotise pas à l’assurance chômage, ce qui signifie qu’il ne peut pas prétendre aux allocations en cas de cessation d’activité.
Pour valider 4 trimestres de retraite, il est nécessaire de percevoir l’équivalent de 600 fois le SMIC horaire brut.
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Portage salarial et retraite : les cotisations et droits à la retraite pour les freelances en 2025
La gestion de la retraite pour un freelance en portage salarial est simplifiée, car elle est directement prise en charge par la société de portage.
Ce dispositif repose sur un contrat de travail entre le freelance et la société de portage, ce qui permet au freelance de bénéficier des mêmes cotisations sociales et fiscales que les salariés classiques.
En tant que salarié porté, le freelance profite des mêmes avantages sociaux que les autres salariés, tels que la retraite, la sécurité sociale et l’assurance chômage.
- Concernant les cotisations retraite de base (Sécurité Sociale) :
Les cotisations pour la retraite de base sont calculées en fonction du salaire, avec des taux différents selon que le salaire soit inférieur ou supérieur au plafond de la Sécurité Sociale (fixé à 3 925 € par mois en 2025).
- Jusqu’à 3 925 € par mois :
- Le salarié cotise à hauteur de 6,90 % de son salaire.
- L’employeur verse 8,55 % en cotisations.
- Total des cotisations pour cette tranche : 15,45 % du salaire brut.
- Au-delà de 3 925 € par mois :
- Le salarié cotise 0,40 % sur la partie du salaire qui dépasse ce plafond.
- L’employeur cotise 1,90 % sur cette même partie.
- Total des cotisations pour cette tranche : 2,30 % au-delà du plafond de 3 925 €.
Concernant les cotisations retraite complémentaire (Agirc-Arrco) :
Les cotisations pour la retraite complémentaire sont également réparties entre salariés et employeurs.
- Tranche 1 (jusqu’à 3 925 € par mois) :
- Le salarié cotise 4,72 %.
- L’employeur cotise 7,87 %.
- Total des cotisations pour cette tranche : 12,59 % du salaire brut.
- Tranche 2 (au-delà de 3 925 € par mois) :
- Le salarié cotise 12,95 % sur la partie qui dépasse ce plafond.
- L’employeur cotise 21,59 % sur la même partie.
- Total des cotisations pour cette tranche : 34,54 % du salaire brut au-delà du plafond.
Pour 2025, chaque trimestre de retraite est validé dès que le salaire brut atteint 1 782 € pour un trimestre complet. Cela signifie que, pour chaque période de trois mois, si le salarié porté gagne au moins ce montant brut, un trimestre de retraite est validé, tout comme pour un salarié classique. Ce montant est basé sur le seuil de 150 fois le SMIC horaire, soit environ 11,88 € en 2025.
En portage salarial, bien que le consultant soit salarié de la société de portage, le revenu généré par son activité n’est pas entièrement considéré comme un salaire. La société de portage prélève généralement une commission sur le chiffre d’affaires du consultant, qui varie entre 5 % et 10 %.
Quel est l’âge légal de départ à la retraite du freelance ?
Depuis le 1er septembre 2023, l’âge minimum légal de départ à la retraite est fixé à 62 ans et 3 mois pour les personnes nées entre le 1er septembre 1961 et le 31 décembre 1961. Cet âge augmente de 1 trimestre par an en fonction de l’année de naissance.
L’âge de départ à la retraite à taux plein (172 trimestres) est quant à lui fixé à 67 ans, ce qui signifie que le freelance pourra percevoir la totalité de sa pension, quel que soit le nombre de trimestres cotisés.
Si le freelance n’a pas cotisé suffisamment de trimestres, il peut malgré tout partir à la retraite, mais une décote de 1,25% sera appliquée par trimestre manquant, pour un maximum de 20 trimestres.
En revanche, si le freelance a cotisé plus de trimestres que nécessaires pour partir à la retraite, il bénéficiera d’une majoration de 1,25% par trimestre supplémentaire cotisé.
Références :