Le portage salarial est une forme d’emploi qui attire les professionnels qui souhaitent conjuguer autonomie et sécurité. En effet, ce dispositif permet à un consultant indépendant de développer son activité de manière indépendante tout en bénéficiant du statut protecteur de salarié.
Encadré par une législation spécifique, le portage salarial offre une vraie liberté aux entrepreneurs.
Que dit précisément la loi sur le portage salarial ? Voyons dans cet article les aspects clés de la réglementation du portage salarial.
Portage salarial : comprendre les droits et obligations des parties
Les articles L1254-1 à L1254-42 du Code du travail définissent les règles régissant le portage salarial.
- Le salarié porté : un professionnel indépendant avec un statut salarié
Le salarié porté est un professionnel autonome qui, tout en conservant son indépendance, bénéficie du statut de salarié grâce à une société de portage salarial.
Concrètement, il sélectionne une société de portage en fonction de plusieurs critères tels que le taux de commission prélevé sur son chiffre d’affaires et les services proposés (accompagnement, réseau professionnel etc).
- La prise en charge de la gestion administrative par l’entreprise de portage salarial
Une fois l’entreprise de portage choisie, le salarié porté signe un contrat de travail (en CDD ou CDI) avec cette dernière, qui devient son employeur. Une fois la mission réalisée, la société de portage salarial facture le client en son nom. Elle s’occupe de toutes les démarches administratives (rédaction des contrats, gestion de la facturation, recouvrement des paiements, etc.) et des démarches déclaratives sociales et fiscales.
Comme pour un salarié classique, la période d’essai permet aux parties de mettre fin au contrat de travail par une notification. Après la période d’essai, la rupture du contrat en portage salarial est possible dans le cadre d’une démission du salarié porté, d’une rupture conventionnelle ou d’un licenciement pour cause réelle et sérieuse.
- L’autonomie et l’indépendance du salarié porté
Contrairement à un salarié classique, le salarié porté conserve son autonomie dans la recherche de ses missions et la gestion de ses clients. Il négocie le prix de ses prestations ainsi que la durée de la mission. Il choisit ses missions de manière indépendante, sans être subordonné hiérarchiquement à l’entreprise de portage.
Enfin, il bénéficie des avantages sociaux du salariat (sécurité sociale, cotisations retraite, assurance chômage, etc.) tout en restant libre dans l’organisation de son travail.
- La rémunération du salarié porté
En échange, la société de portage verse au salarié porté un salaire basé sur le montant des honoraires facturés au client, après avoir retenu des frais de gestion.
Le salarié porté perçoit une rémunération brute mensuelle minimale prévue par l’article 21 de la convention collective 2017. Cette rémunération est égale à 77 % du plafond mensuel de la sécurité sociale de l’année.
La rémunération des salariés portés comprend les éléments suivants :
- Prime de précarité : pour les contrats à durée déterminée (CDD), le salarié perçoit une prime de précarité de 10 % de son salaire brut, (article L1243-8 du Code du travail).
- Congés payés : le salarié porté bénéficie de 2,5 jours de congés payés pour chaque mois de travail effectif.
- Indemnité d’apport d’affaires : 5 % des honoraires facturés au client, ainsi qu’une réserve de 10 % du salaire de base pour les contrats à durée indéterminée (CDI) basée sur la dernière mission.
- Éligibilité aux élections professionnelles : après 6 mois d’ancienneté, le salarié a le droit de vote et peut se présenter aux élections professionnelles, renforçant ainsi son engagement au sein de l’entreprise.
- Exemptions de clauses : le salarié porté est exempté des clauses d’exclusivité et de non-concurrence qui pourraient entraver son autonomie professionnelle.
Le salarié porté doit respecter les obligations suivantes :
- Développer son activité.
- Honorer les missions contractuelles établies avec les clients.
- Informer la société de portage du déroulement de la prestation.
- Transmettre à la société de portage tous les éléments relatifs à chaque contrat de prestation.
- Fournir à la société de portage salarial toutes les informations nécessaires pour faciliter l’établissement de son bulletin de paie.
- Rôle et obligations légales de la société de portage salarial
Un contrat de travail lie le consultant à l’entreprise de portage, qui s’engage à lui verser une rémunération, à gérer ses cotisations sociales, et à lui offrir un accompagnement personnalisé ainsi que les avantages sociaux liés à son statut de salarié.
La société de portage salarial remplit donc le rôle d’employeur vis-à-vis du salarié porté.
En échange de la gestion administrative de son activité, la société de portage prélève des frais de gestion sur le chiffre d’affaires généré par le salarié porté.
Seule l’entreprise de portage salarial est autorisée à conclure des contrats de travail en portage salarial. Les conditions et obligations qui encadrent cette activité sont définies dans l’article 18 de la convention collective du portage salarial.
Pour qu’une société de portage salarial soit légalement reconnue, elle est soumise à plusieurs obligations légales à savoir :
- Elle doit se déclarer auprès de l’autorité administrative compétente (article L1254-27 du Code du travail)
- Elle doit exercer exclusivement une activité de portage salarial (article L1254-24 du Code du travail).
- Elle ne peut pas offrir des prestations de service à la personne (baby-sitting, les tâches ménagères, etc…)
- Elle doit mettre en place un compte d’activité (article L1254-25 du Code du travail). Les salariés portés ont accès à ce compte, afin de suivre les différentes transactions.
- Elle doit souscrire une assurance responsabilité civile professionnelle
- Elle est tenue de fournir une garantie financière (article L1254-26 du Code du travail). Cette garantie vise à couvrir le paiement des salaires, indemnités et autres accessoires en cas de défaillance de l’entreprise.
Le montant de cette garantie doit être calculé en fonction de la masse salariale annuelle de l’entreprise et doit représenter au moins 10 % de cette masse salariale pour l’année écoulée. De plus, la garantie ne peut être inférieure à deux fois le plafond annuel de la Sécurité sociale pour l’année concernée.
La société de portage salarial a droit au paiement des honoraires négociés par le salarié porté, qui, après déduction des frais de gestion et des cotisations sociales et patronales, sont versés sous forme de salaire au salarié.
- Responsabilités et droits de l’entreprise cliente en portage salarial
Le salarié porté et l’entreprise cliente doivent s’accorder sur les conditions de la mission et les prestations à réaliser, tout en respectant les termes définis par la société de portage.
Par ailleurs, la durée maximale de la prestation du salarié porté ne peut excéder 36 mois (3 ans) dans le cadre d’un portage salarial. Cette limite concerne la durée d’une mission spécifique, et non le contrat de travail avec l’entreprise de portage salarial.
L’entreprise cliente peut négocier le tarif de la prestation de portage salarial avant le début de la mission et veille à ce que le salarié porté puisse accomplir sa mission dans de bonnes conditions.
De plus, la société de portage doit être informée par l’entreprise cliente de toute difficulté pouvant affecter la mission du salarié porté, comme des changements dans l’organisation de la mission ou des problèmes impactant la sécurité ou les conditions de travail.
Le salarié porté a une obligation de moyens si la mission consiste à fournir des moyens ou des efforts pour atteindre un objectif (sans garantir le résultat). Il s’agit d’une obligation de résultats si l’objectif est clairement défini (par exemple, une performance ou un résultat attendu).
Le salarié porté s’engage à réaliser la mission dans les délais prévus dans le contrat, sous peine de sanctions contractuelles, telles que des pénalités de retard ou la résiliation du contrat en cas de non-respect des engagements pris.
Réglementation du portage salarial : les étapes clés
- Le cadre légal du portage salarial
L’année 2008 marque la reconnaissance officielle du portage salarial. Ensuite, les réformes se sont enchaînées pour renforcer l’encadrement du portage salarial, assurant ainsi une pratique transparente et sécurisée pour les différentes parties.
Aussi, la loi du portage salarial du 25 juin 2008 relative à la modernisation du marché du travail a permis l’intégration et la reconnaissance du portage salarial dans le Code du travail.
Par la suite, le projet d’accord collectif du 24 juin 2010, qui visait à encadrer le portage salarial, a constitué une avancée significative dans la régulation de cette forme d’emploi. Ce projet avait pour objectif de clarifier la structure du portage salarial en précisant les droits et obligations des différentes parties prenantes. Il a ensuite été annulé par le Conseil d’État en 2014.
L’ordonnance du 2 avril 2015 et le décret du 30 décembre 2015 ont été des étapes majeures dans la régulation du portage salarial en France. Ces textes ont contribué à sécuriser le cadre légal du portage salarial et à en élargir l’accès tout en protégeant les différentes parties prenantes.
En effet, l’ordonnance de 2015 inscrit le portage salarial dans le Code du travail, en précisant les définitions et règles applicables. Elle prévoit notamment :
- une qualification minimale pour devenir salarié porté ;
- une autonomie dans la recherche des clients par le salarié porté ;
- un salaire mensuel minimum pour les salariés portés ;
- l’élargissement du recours au portage salarial ;
- la possibilité de bénéficier de l’assurance chômage ;
- l’encadrement des sociétés de portage salarial.
La Convention collective de branche des salariés en portage salarial du 22 mars 2017 marque une autre étape clé dans la structuration et l’encadrement du portage salarial en France en créant une véritable branche professionnelle pour les salariés en portage salarial. Elle accorde une légitimité au secteur d’activité sur le marché de l’emploi.
Cette Convention rassemble également, les différents acteurs du portage salarial (salariés portés, entreprises de portage, entreprises clientes) sous un cadre commun, facilitant la négociation collective et la régulation des pratiques du secteur.
Dans le prolongement de l’ordonnance du 2 avril 2015, elle précise de nouveau les points suivants :
- la qualification minimum d’un bac +2 ou de trois ans d’expérience
- la classification des salariés portés : junior, sénior, forfait-jour ; selon l’ancienneté du salarié porté ;
- l’abaissement du salaire minimum des salariés portés à 70 % du plafond de la Sécurité sociale ;
- l’instauration d’une réserve financière de 10 % des revenus bruts des salariés portés.
- Le portage salarial : zoom sur les dispositions du Code du travail
Comme nous l’avons vu, l’année 2015 marque un nouveau tournant dans l’histoire du portage salarial car c’est à ce moment que la réglementation du portage salarial a été intégrée dans le Code du travail, introduisant plusieurs dispositions clés pour encadrer le dispositif.
Parmi celles-ci figurent :
- L’article L1254-1 du Code du travail qui définit le portage salarial comme une relation entre trois acteurs : une entreprise de portage salarial – un salarié porté – une entreprise cliente.
- L’article L1254-3 et L1254-4 du Code du travail qui précisent les conditions dans lesquelles un salarié peut être porté.
- L’article L1254-15 du Code du travail encadre le contrat à durée déterminée (CDD) du salarié porté.
- L’article L1254-20 et L1254-21 du Code du travail qui régissent le contrat à durée indéterminée (CDI) du salarié porté.
- L’article L1254-22 et L1254-23 du Code du travail qui définissent les modalités du contrat commercial de prestation en portage salarial.
- L’article L1254-24 et suivants du Code du travail qui régissent les sociétés de portage salarial.
Textes de référence :
- Articles L1254-1 à L1254-42 Code du travail.
- Article L1243-8 Code du travail.
- Loi du 25 juin 2008 relative à la modernisation du marché du travail, qui introduit le portage salarial dans le Code du travail.
- Projet d’accord collectif du 24 juin 2010.
- Ordonnance du 2 avril 2015 qui inscrit le portage salarial dans le Code du travail précise les définitions et règles applicables.
- Décret du 30 décembre 2015 qui accompagne l’ordonnance de 2015 dans la régulation du portage salarial.
- Convention collective de branche des salariés en portage salarial du 22 mars 2017 qui crée une véritable branche professionnelle pour les salariés en portage salarial.