Parmi les nombreuses réformes en droit social ce début d’année, la réforme de l’assurance chômage a également beaucoup fait parler d’elle.
Le décret du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage (n°2019-797) prévoit en effet d’instaurer à compter du 1er mars 2021, un système de “bonus-malus“ sur les contributions chômage.
Le “bonus malus” vise une modulation à la hausse ou à la baisse du taux de contribution d’assurance chômage à la charge des employeurs, en fonction du taux de séparation des entreprises.
A ce jour, le taux de contribution d’assurance chômage est de 4,05% (renvoi lien interne article sur cotisations).
Plusieurs conditions sont prévues pour l’application du dispositif “bonus malus” dans les entreprises. Décryptage d’une réforme technique pour anticiper les effets de son application dès à présent.
Ce qu‘il faut savoir :
- Le taux de contribution d’assurance chômage est une cotisation exclusivement patronale visant à assurer le salarié en cas de perte d’emploi.
- Au 1er janvier 2020 ce taux est de 4,05%.
- Le dispositif du “bonus malus” est applicable à compter du 1 mars 2021 mais prendra en compte les périodes de références des années précédentes. Il est donc primordial de connaître les dispositions législatives dès à présent afin d’anticiper aux mieux les effets de ce nouveau dispositif.
Comment fonctionne le dispositif du bonus malus ?
L’objectif affiché du gouvernement, est de favoriser les entreprises ayant le moins recours aux contrats de courte durée, et de pénaliser les entreprises ayant recours trop souvent à ces contrats jugés précaires.
Le bonus malus sera évalué en fonction d’un taux dit de “séparation”.
Qu’est ce que le taux de séparation ?
Le taux de séparation est le rapport entre le nombre de fins de contrats de travail imputés à l’entreprise donnant lieu à inscription à Pôle emploi et l’effectif de l’entreprise.
Cela signifie que plus il y aura de fins de contrats dont l’entreprise est responsable, plus le taux de séparation sera élevé.
Comment se calcule le taux de séparation ?
L’article 50-5 du décret relatif à la réforme de l’assurance chômage définit le taux de séparation de l’entreprise comme “ la moyenne, sur la période de référence, des quotients, par exercice de référence, du nombre de séparations imputées à l’entreprise par l’effectif de l’entreprise. Le décompte de l’effectif de l’entreprise mentionné au premier alinéa est effectué conformément à l’article L. 130-1 du code la sécurité sociale.”
Autrement dit, le calcul est réalisé en divisant le nombre de séparations imputées à l’entreprise par son effectif et ce sur les 3 dernières années afin d’obtenir une moyenne du taux de séparation de l’entreprise.
Mais attention, il faut être vigilant quant à la période de référence concernée. En effet, il s’agit de prendre en compte le nombre de rupture de contrat sur une année civile (article 50-7 du décret).
A titre transitoire, la première année d’application du bonus-malus prendra en compte la période de référence comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 2020.
A compter de la deuxième année d’application, la période de référence correspondra à la période comprise entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2021.
La comparaison du taux de séparation et du taux de séparation médianpour déterminer le bonus malus
L’article 50-9 du décret définit le taux de séparation médian comme “ la moyenne, sur la période de référence, des médianes par exercice de référence des taux de séparation de l’ensemble des entreprises du secteur de 11 salariés et plus, pondérées par la masse salariale de ces mêmes entreprises dans la masse salariale totale de l’ensemble des entreprises du secteur de 11 salariés et plus.”
Ce taux de séparation médian est déterminé chaque année pour chaque secteur par arrêté ministériel.
En résumé, le taux médian est le taux de rupture constaté dans un secteur d’activité.
C’est en comparant le taux de séparation de l’entreprise avec le taux de séparation médian qu‘il est possible de déterminer le bonus malus d’une entreprise (article 50-4 du décret).
Les secteurs d’activité ciblés par la réforme
A ce jour, la réforme cible 7 secteurs d’activité qui se verront appliquer le dispositif du bonus malus. Ces secteurs d’activités sont visés car ils détiennent un taux de séparation moyen important, celui-ci étant supérieur à 150% (article 50-3 du décret).
Ainsi, les secteurs concernés sont les suivants :
- fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac (code NAF : CA)
- transports et entreposage (code NAF : HZ)
- hébergement et restauration (code NAF : IZ)
- travail du bois, industries du papier et imprimerie (code NAF : CC)
- fabrication de produits en caoutchouc et en plastique ainsi que d’autres produits minéraux non métalliques (code NAF : CG)
- production et distribution d’eau ; assainissement, gestion des déchets et dépollution (code NAF : EZ)
- autres activités spécialisées, scientifiques et techniques (code NAF : MC)
Quels sont les fins contrats pris en compte pour déterminer le bonus malus ?
Toutes les fins de contrats de travail sont prises en compte, à l’exception :
- des démissions ;
- des fins de contrat d’apprentissage et de professionnalisation ;
- des fins de contrat unique d’insertion ;
- des fins de CDD conclus au titre de la politique de l’emploi (art. L. 1242-3, 1° Code du travail) (ex. : CDD d’insertion) ;
- des fins de contrats de mise à disposition de salariés d’entreprises de travail temporaire d’insertion (intérim par l’insertion) ;
- des fins de contrats de mise à disposition de salariés handicapés d’entreprises adaptées de travail temporaire (loi 2018-771 du 5 septembre 2018, art. 79).
Serez-vous concerné par le dispositif du bonus malus ?
Le bonus-malus concerne uniquement les employeurs de 11 salariés et plus appartenant à certains secteurs d’activité à fort taux médian de séparation comme nous l’avons vu précédemment.
Un point de vigilance particulier concerne cependant les seuils d’effectifs des entreprises. En effet, le franchissement du seuil de 11 salariés n’est prise en compte que si ce seuil a été atteint ou dépassé durant 5 années civiles consécutives. En revanche, les entreprises nouvelles atteignant le seuil de 11 salariés dès leur création ou par suite d’une fusion de plusieurs entreprises, ne seront soumises au bonus malus qu’après un délai de 3 ans suivant la création ou la fusion. Durant ces 3 ans, c’est le taux de général de 4,05 % qui s’applique.
Bien que l’application du décret ne soit pas prévue avant mars 2021, il est important que les entreprises commencent déjà à adapter le nombre de contrats courts auxquels elles ont recours. Rappelons en effet que la période de référence prendra en compte l’ensemble des fins de contrats à compter de 2020. Pour les meilleurs élèves, le taux de contribution à l’assurance chômage sera abaissé au plus bas à 3%. Pour les moins chanceux, le taux de contribution pourra atteindre jusqu’à 5,05%.
Textes de référence :
- décret n°2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage
- article L. 130-1 du code la sécurité sociale
- article 50-7 décret n°2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage
- article 50-9 décret n°2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage
- article 50-3 décret n°2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage
- Article 50-4 décret n°2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage
- article L.1242-3 Code du travail
- loi 2018-771 du 5 septembre 2018, art. 79