La créativité c’est la découverte d’idées nouvelles, originales mais aussi l’art de considérer et de faire les choses différemment dans un contexte défini. Ainsi, lors d’une étude qualitative, la créativité peut permettre d’atteindre une autre dimension dans l’exploration d’un problème ou d’un produit pour mieux l’appréhender et d’approfondir et d’optimiser les résultats de l’étude.
Pourquoi introduire de la créativité ?
Dans une investigation qualitative, forcément normée pour atteindre l’objectif de compréhension souhaité, introduire une posture créative apporte des éléments de différenciation. Avec un processus plus ludique et hédoniste, fait de plus d’émotions, elle permet d’ouvrir l’imaginaire et l’inconscient du consommateur, de le faire réagir de façon plus riche.
La créativité permet de façon ludique de sortir du mental et de la logique pour venir solliciter l’inconscient. Elle permet de comprendre de manière plus fine les motivations cachées, en passant la barrière des mots, pour ouvrir de nouvelles portes et exprimer d’autres sensations ou perceptions. Elle va ainsi accueillir des informations plus riches et plus sincères et dépasser les limites du déclaratif.
La créativité va en outre améliorer la proximité et l’empathie avec le consommateur, nécessaire pour contourner les tabous et résistances, libérer l’émotionnel, en autorisant à s’exprimer dans un mode non verbal, kinesthésique ou visuel…
Comment introduire de la créativité ?
Lors du questionnement d’un consommateur, les réponses données par cet individu sont tout d’abord extrêmement rationnelles, conventionnelles. Il va être enrichissant d’aller plus loin en faisant intervenir des techniques projectives et créatives telles que : graphisme, collage, modelage, expression corporelle (jeux de rôles…), identification (portraits chinois, planètes, blasons…).
Ces techniques vont proposer au consommateur de se dissocier de la question posée en se mettant dans une autre situation ou en mettant en scène un autre personnage. L’individu interrogé projette alors son propre système de valeurs sans se censurer puisque ses réponses ne l’impliquent plus directement. Cette liberté permet d’accéder aux vraies dimensions de la problématique et d’évacuer ainsi les a priori subjectifs.
Ainsi, si vous demandez à un consommateur ce qu’il aime dans son soda préféré, ses premières réponses seront logiques et implacables : « J’aime son goût sucré, les bulles quand je le bois etc… ». Par contre, si vous lui demandez de décrire son soda préféré comme il le faisait enfant par un portrait chinois ses réponses apportent alors un éclairage permettant d’aller plus loin dans l’exploration du produit sur des dimensions émotionnelles et sensuelles réelles : « Ce serait …un nuage, un ours en peluche, un marathonien, le rouge, un ciel d’Espagne… » qui vont permettre d’identifier d’autres leviers de compréhension sur le produit et ses motivations inhérentes par exemple sa capacité d’évasion mentale.
De la même manière, un individu aura du mal à répondre directement à une question de peur d’avouer des attitudes ou des comportements en contradictions avec l’image qu’il veut donner de lui-même à son interlocuteur mais aussi à la société. Ainsi, si vous lui demandez ce qui est important pour lui dans son alimentation il vous répondra : « Je fais très attention au sucre, au gras, à manger des fruits et légumes » réponse très canoniale dans nos sociétés de consommation actuelles. Mais dans un jeu de rôle, il mettra en scène un personnage mangeant goulument et avec plaisir un hamburger/ frites sans se soucier le moins du monde de son image.
Qu’est-ce que la créativité apporte dans l’analyse ?
L’analyse approfondie du discours recueilli constitue une phase indispensable de l’étude qualitative. Elle permet d’acquérir des connaissances fines sur la perception et le comportement des consommateurs ou la performance des produits testés.
Le décodage des exercices créatifs va permettre de reconstruire le sens caché du discours projectif, l’image sociale du produit ou sa valeur émotionnelle. Et donc de compléter et d’affiner l’analyse du discours.
Par exemple, lors d’un test de concept produit, si l’on demande au préalable, à un consommateur de faire le dessin/croquis de ce nouveau produit, avant même de l’avoir découvert visuellement, on verra apparaitre dans son graphisme, des formes, tailles et choix de couleurs fondamentaux, qui permettront de comprendre plus finement les clés et niveaux d’adhésion au produit présenté dans un deuxième temps. Des données liminaires qui pourront permettre d’ajuster et maximiser la conception du produit final.
On le voit, la créativité a de nombreux bénéfices et devrait occuper une place majeure au sein des méthodologies qualitatives. Mais elle nécessite du temps pour entrer dans l’imaginaire et contourner les mécanismes de défense ou de rationalisation du consommateur. Et l’allongement de la durée d’un groupe ou entretien n’est pas toujours possible sur un marché des études en tension en termes de délais ou de coût.
Pourtant, en se donnant du temps pour laisser libre court à l’imagination, on apporte des éléments de réponse qui vont enrichir l’investigation. La créativité dans une étude qualitative fait ressortir des éléments qui seraient passés inaperçus dans un discours rationnel et optimise grandement les résultats de l’étude. Elle encourage la réflexion et la construction d’une analyse qualitative plus approfondie et plus juste.