LES PRODUITS DE GRANDE CONSOMMATION, CROISSANCE ZÉRO
La fin de la « grande crise » qui se profile depuis un an aurait pu se traduire par une reprise régulière des volumes vendus en PGC (produits de grande consommation). Or, il n’en est rien : les « bons mois » alternent avec les moins bons, pour au final aboutir à une évolution annuelle proche de zéro.
Et il est fort à parier que ces marchés resteront durablement « flats ». Les enseignes de la grande distribution s’engouffrent dans les « nouveaux territoires » comme le bio, le végan, le « non transformé » pour tenter de retrouver la croissance, qui fait défaut sur leur core business. Ils risquent, cependant, de n’opérer qu’un transfert de volume et valeur au détriment du « conventionnel », de la boucherie et du traiteur, par exemple.
Jusqu’ici, enseignes comme industriels parvenaient à trouver des relais de croissance pour faire face à leurs difficultés sur le marché domestique via une expansion géographique (export, internationalisation) et une innovation qui leur ouvrait de nouvelles sources de volume et de rentabilité.
Le périmètre de concurrence se cantonnait aux « grandes surfaces » physiques dans lesquelles les « shoppers » étaient bien obligés de réaliser leurs achats…
Dans ce contexte, même les « moyennement performants » tiraient leur épingle du jeu.
Seuls les plus faibles disparaissaient en se faisant avaler par les « dominants » qui, eux, connaissaient une expansion forte et continue : Mammouth repris par Auchan, Promodès par Carrefour par exemple pour la Grandes et Moyennes Surfaces.
Aujourd’hui, au manque d’appétence des shoppers ou consommateurs cité plus haut, s’ajoute une multiplicité de « solutions » qui sont autant de limites au périmètre de la « grande conso classique » : internet, les circuits alternatifs, l’auto-production, les circuits courts…
ALLIER STRATÉGIE ET BONNE EXÉCUTION
Demain, la seule stratégie pour se développer sera de prendre de la part de marché en étant (bien) meilleur que les concurrents, et ce par 2 moyens : pas d’erreurs de stratégie et excellence opérationnelle.
Pour illustrer ce propos, un contre-exemple et un exemple pour les enseignes de GD :
Le « contre-exemple » : Carrefour a cumulé depuis une quinzaine d’années des erreurs de stratégie -lancement de « Carrefour Planet », concept très coûteux à un moment où les marchés commençaient à décroître, implantation à marche forcée dans des marchés émergents durement touchés par la crise de 2008, retard sur le drive et le digital – à la récurrence d’un grand nombre de « scories » dans le parcours d’achat de ses shoppers : ruptures en rayons, complexité des promotions, « froideur » de la communication auprès des consommateurs.
Avec, au final, une érosion continue de sa taille de clientèle et la perte de son leadership en part de marché France : lors de la reprise de Promodès à la fin des années 1990, le groupe Carrefour pesait 27% de la GMS, contre 20% aujourd’hui, quand Leclerc passait de 16 à 20,5%…
Espérons que la nouvelle gouvernance de Carrefour aura tiré les bonnes analyses de ces errements du passé et arrivera à concrétiser ses pistes d’amélioration dans la réalité quotidienne de ses magasins !
L’exemple, en « négatif » du précédent : les enseignes d’indépendants, Leclerc et Système U en tête.
Rappelons-nous qu’à la fin des années 1990, quand les « intégrés » comme Carrefour étaient considérés comme les premiers de la classe, de nombreux experts de la grande consommation voyaient en Leclerc et Système U de futurs « condamnés au déclin » : trop franco-français, trop ruraux, trop « terrain » (plus d’anciens bouchers que d’énarques chez leurs dirigeants), et trop « petit » pour Système U, en surface de vente (comment lutter contre des « paquebots » comme les hypers Carrefour ou Auchan quand on est 4 ou 5 fois plus petit ?) et en part de marché : à peine 6%, soit moins d’un quart de Carrefour…
20 ans plus tard, Leclerc dépasse Carrefour (tous circuits confondus) et Système U dépasse 10% de part de marché, soit la moitié de ce dernier !
Pourquoi cette réussite ?
Grâce à la convergence d’une stratégie claire et constante – qualité des produits, prix compétitifs, engagement sociétal, ancrage territorial – et une grande qualité dans l’exécution opérationnelle : peu de ruptures, promotions simples, fraicheur des produits, prix compréhensibles, accueil chaleureux, SAV efficient…
ENSEIGNES ET INDUSTRIELS SONT SUR LE MÊME BATEAU
Concernant les industriels, même combat : face à la forte pression sur les volumes et la rentabilité, il s’avère(ra) crucial pour eux d’être plus « pointus » quant à la rentabilité de leurs investissements.
Là aussi, les 2 mêmes piliers :
- Une stratégie efficiente avec en premier lieu une exploitation des poches de croissance comme le bio, les « sans » (antibiotiques, sel, sucre, gluten…), le vegan, l’ « artisanal »…
- ET une exécution de grande qualité : ciblage des clients, expertise en category management, merchandising pointu, promotions pertinentes, communication efficace sur les cibles consommateurs et cohérente sur tous les canaux.
Au final, l’enjeu sera de mettre encore plus d’« intelligence » dans les entreprises (siège et terrain) et d’exigence dans le professionnalisme des équipes, de « hausser le niveau de jeu ».
En conclusion, il en ira de la survie des entreprises de la grande consommation comme du changement climatique : il ne faut pas attendre qu’il soit trop tard pour agir.
Pour elles, » l’excellence, c’est pour maintenant » !